Après deux années compliquées, la nouvelle saison culturelle de La Maison tombe à pic. Une programmation riche et éclectique qui sonne comme une parenthèse enchantée et une invitation au voyage.
Tel un bateleur bien rodé, Jean-Luc Revol sait faire l’article, vendre son programme et communiquer sa passion. Le directeur de La Maison espère que cette nouvelle saison « redonnera envie au public d’avant Covid de reprendre le chemin des habitudes » en poussant à nouveau les portes de l’imposant paquebot arrimé à la rive droite de la Loire.
Cette saison, il l’assure, « attisera la curiosité, donnera envie », avec notamment des surprises, des spectacles féeriques et aquatiques, des histoires étranges et étonnantes, des morceaux de vie ou des expériences partagées, des sujets sérieux et contemporains, des marionnettes gigantesques… Le tout est concocté par des artistes venus des quatre coins de France et du monde.
Ces pépites et ces nouveautés ont, dans leur forme ou les sujets abordés, une résonance avec l’actualité. C’est notamment le cas de la pièce Le Chevalier et la Dame (mise en scène de Jean-Luc Revol, Théâtre du Caramel Fou), dans laquelle Carlo Goldoni, auteur dramatique vénitien du XVIIIe siècle, donne pourtant la vision d’une société moderne. Il faut citer également, L’Ecole des maris, un des plus gros succès de Molière pourtant très peu adapté, qui renaît sous le regard de Luc Cerutti. Une esthétique contemporaine en alexandrins et sur fond d’émancipation féminine. Maman, de Samuel Benchetrit, avec Vanessa Paradis, interroge sur le rôle de la femme en quête de maternité, à la fois drôle et dramatique ; les comédiens évoluent dans un univers décalé proche de l’univers de Blier. Le sexisme sera évoqué avec Renversante, dont plusieurs représentations sont prévues dans les collèges du département et se termineront par un débat afin de déconstruire les stéréotypes.
D’autres sujets sociétaux sont ainsi vus à travers le prisme de l’art. HPS Marché pirate sur le darknet, c’est l’histoire de son créateur et de sa descente aux enfers. Le Syndrome de l’oiseau fait écho à l’histoire de Natacha Kampusch ; dans cette pièce Sara Girardeau vit sa dernière heure de séquestration, un défi de taille. Un sujet grave où l’horreur et l’espoir se mêlent, dévoilant avec poésie la puissance de l’instinct de survie. Pour My Land (Recirquel Company Budapest), spectacle de cirque programmé en 2021, le chorégraphe Bence Végi a imaginé interroger le rapport entre l’homme et la terre. Un spectacle envoûtant où les 7 acrobates danseurs ukrainiens interprètent ce lien et invoquent les mythes les plus anciens. Portés par des chants sacrés, ils magnifient ce rapport à la terre et rappellent sans aucun doute la lutte du peuple ukrainien.
Le dérèglement climatique n’échappe pas au radar des artistes et aux regards acerbes des compagnies théâtrales, Dimanche (Collectif Focus & Chaliwaté) dépeint l’humanité à travers une famille, de façon absurde, face à son obsession à préserver son quotidien sans se préoccuper des catastrophes naturelles qui s’annoncent. Un regard à peine exagéré qui interroge. On y trouve également le questionnement sur la place des écrans dans notre quotidien, avec un grand classique, une réadaptation de Fahrenheit 451, la célèbre dystopie de Ray Bradbury.
D’autres sujets plus légers, sont aussi abordés. Avec Voyage au bout de l’ennui, Sylvère Lamotte (artiste associé de La Maison, Cie Lamento) nous plonge dans les dimanches assommants. Une chorégraphie originale et particulière qui sublime l’ennui en lui donnant de l’intérêt. Direction la piscine Aquabalt avec une représentation inédite, La mémoire de l’eau. Rien ne prédestinait la chorégraphe, Nathalie Pernette (Cie Pernette) à imaginer une danse avec cet élément qu’elle déteste. Les quatre danseuses s’adaptent à l’environnement et évoluent en dehors ou dans l’eau, créant une ambiance poétique sublimée par les lumières.
Concernant le cirque, cette année, Jean-Luc Revol a privilégié des spectacles très éloignés des grosses productions. Son coup de cœur, 080 (zéro quatre-vingt) de la Cie H.M.G, retrace l’histoire d’un personnage asexué qui vient de naître. Une succession de premières fois dans lesquelles le personnage apprivoise son espace et sa temporalité.
D’autres représentations, plus intimistes, nous plongent dans les souvenirs et les expériences vécues. Avec 36 chandelles de la maison de Molière, Catherine Salviat, nous confie ses souvenirs de ses 36 ans passés à la Comédie-Française. Cent mètres papillon est l’histoire inspirée de Maxime Taffanel, nageur de haut niveau devenu comédien ; à travers son expérience, celui-ci nous plonge dans le grand bain et nous transporte dans sa quête pour devenir champion.
Une autre histoire vécue, avec La longue route. En 1968, neuf hommes ont pris le départ de la première course à voile en solitaire autour du monde sans escale (Golden Globe Race). Ce voyage initiatique, sublimé par la mise en scène d’Amélie Jaillet, raconte l’histoire du navigateur et écrivain français, Bernard Moitessier, qui après avoir franchi le Cap Horn, a décidé de rester dans les mers du Sud et de finir à Tahiti pour « sauver son âme », comme il l’a dit, plutôt que de retourner vers la civilisation. Lazzi propose la retranscription d’une grande histoire d’amitié entre deux comédiens ; Fabrice Melquiot invite le public à être le témoin de cette amitié entre Philippe Torteron et Vincent Garanger qui se déroule dans le Morvan.
Il y a aussi les spectacles féeriques, des pièces de théâtres fantastiques et des grands classiques rejoués. La prouesse technique de Moby Dick est impressionnante. Des marionnettes à taille humaine évoluent sur la scène, il paraît même que la baleine est elle aussi de taille réelle. Quant à La Mouche, même si les effets spéciaux sont moins impressionnants que ceux de David Cronenberg, dans cette version, le quotidien couple mère-fils est ponctué par des expériences de téléportations. Cette histoire rappelle un épisode de la célèbre émission Strip-Tease (La soucoupe et le perroquet). Les inconditionnels des ballets classiques savoureront la soirée consacrée à Stravinski, avec L’Oiseau de feu et Le Sacre du printemps.
De la musique et de l’humour pour finir cette présentation succincte de la programmation 2022/23. Un spectacle musical avec Daniel Auteuil côté chant, une Nivernaise à l’honneur, Liz Van Deuq et Maxime Le Forestier qui chantera Brassens.
Une soirée à retenir : celle du 22 octobre, avec le bal chorégraphique Red is the new blue. Imaginer, le temps d’une soirée, le hall de La Maison qui se transforme en boîte de nuit… Une soirée festive pour vous inviter à entrer dans la danse (gratuite et sur réservation uniquement).
L’humoriste belge Guillermo Guiz sera sur la scène de La Maison, pour présenter son nouveau spectacle Au suivant !. Mehdi-Emmanuel Djaadi fera son Coming Out, dans lequel il se confesse sur son parcours néanmoins atypique.
Bref, cette saison est un véritable melting pot culturel composé de têtes d’affiche connues et de compagnies en devenir, présentant les différentes formes d’expression artistique, des spectacles pour tous les âges et tous les publics. Une programmation qui a de quoi satisfaire même les plus indécis.
Bien sûr, seulement quelques spectacles sont cités dans cet article, vous pouvez retrouver l’intégralité de la programmation sur le site de La Maison : https://maisonculture.fr/
Côté jardins, c’est un spectacle par mois, d’octobre à mai, qui se joue dans divers lieux du territoire. Une délocalisation qui commence à faire de nombreux émules.
Théâtre au vert (29 juin et 21 juillet) deux spectacles gratuits et sur réservation de danse hip-hop, sur le parvis Marcel-Narquin.
Eclats, ce dispositif permet de développer la diffusion des arts plastiques (toutes disciplines confondues) sur le territoire en délocalisant une exposition de La Maison.
Qui n’a jamais rêvé d’avoir une vraie œuvre d’art sous son toit ? C’est possible depuis 2021 avec l’Artothèque. Vous pouvez choisir votre œuvre à emprunter en parcourant la galerie virtuelle : (www.maisonculture.fr)
La tournée d’alimentation générale culturelle : du 30 juin au 26 août, tous les jeudis et vendredis, dans plus de 50 communes du département : toute la programmation sur le site de La Maison ou sur Facebook @alimentation.generale.culturelle.
Les rendez-vous musicaux avec les partenaires :
L’Orchestre d’harmonie de la Ville de Nevers, les Cafés de la voix, l’Orchestre symphonique des Concerts nivernais
Les rendez-vous cinéphiles avec l’ACNE
Les transhumances artistiques qui se dérouleront les 3 et 4 septembre, à l’étang de Niffond et au lac des Settons. Deux balades, l’une à pied et l’autre à vélo, imaginées par le chorégraphe Sylvère Lamotte, artiste associé de la Maison, qui vous emmène pour la deuxième année consécutive dans un parcours bucolique ponctuée d’arrêts afin d’assister à des performances de danseurs de la Cie Lamento (gratuit et sur réservation uniquement).
Les expositions :
- TCF / Compagnie Jean-Luc Revol, un chemin de théâtre qui retrace les 35 ans du Théâtre du Caramel fou.
- Infime poésie de l’invisible, quatre artistes nivernais, aux pratiques artistiques diverses, se retrouvent sur la même thématique, « montrer l’invisible »
- Estampes, stampare, imprimer… : la gravure mise à l’honneur grâce à la collection exceptionnelle de la Médiathèque Jean-Jaurès.
- Eclats, expos mobiles dans la Nièvre : en 2023, les gravures s’exporteront jusqu’au musée du Grès de Saint-Amand-en-Puisaye.