Quelques jours après le lancement du Plan départemental de la ressource en eau, le 21 septembre, Fabien Bazin, président du Conseil départemental, a rencontré les responsables du Syndicat intercommunal d’alimentation en eau potable (SIAEP) de l’Ixeure à la Nièvre pour évaluer concrètement l’impact des sécheresses estivales et des hivers trop peu arrosés, des phénomènes naguère exceptionnels qui frappent désormais plus fréquemment et plus fort.
2018, 2019, 2020, 2022. Le rythme des sécheresses estivales s’est terriblement resserré dans la Nièvre, soumise il y a quelques semaines encore à des impératifs préfectoraux de restriction d’eau. Impensable dans un département qui revendiquait l’appellation de « vert pays des eaux vives », la crainte de la pénurie s’est matérialisée dans le quotidien des Nivernais et des gestionnaires des Syndicats intercommunaux d’alimentation en eau potable (SIAEP) qui captent, traitent et distribuent l’eau dans le département.
Dans le cadre de la Stratégie d’adaptation au changement climatique et du lancement du Plan départemental de la ressource en eau, le 21 septembre, Fabien Bazin, président du Département, a souhaité rencontrer (1) l’un des SIAEP nivernais pour échanger sur les difficultés auxquelles ils doivent faire face. Le choix s’est porté sur celui de l’Ixeure à la Nièvre, qui couvre 19 communes (voir encadré) rurales.
A Bona, siège du syndicat, Guy Roy, président du SIAEP, et Mathieu Quenault, responsable de l’équipe de sept agents (cinq fontainiers et deux secrétaires), ont dressé un état des lieux préoccupant. « A partir du 1er août, nous avons pompé 100 % de la ressource sans rien pouvoir rendre à la rivière Ixeure », explique Guy Roy. « Par moments, nous avons été obligés de pomper sur toute la journée, au lieu de ne le faire que la nuit. Nous sommes obligés d’avoir une gestion au jour le jour, au plus près. »
Voilà plusieurs années que les fontainiers voient le niveau des captages baisser dangereusement, sans que la ressource ne se reconstitue suffisamment lors des mois théoriquement pluvieux : « Cela fait plusieurs hivers que nous traversons sans avoir assez d’alimentation de nos nappes, ce qui pose le problème de l’état de la ressource. Si le prochain hiver est sec, nous devrons fermer un captage et nous ne pourrons pas alimenter tout le monde. » Mathieu Quenault confirme : « Si nous avons une grosse casse sur notre réseau, qui nous fait perdre par exemple 500 m³, cela peut devenir très compliqué. »
Pour éviter les pannes sèches, l’interconnexion avec le SIAEP voisin d’Imphy, qui puise dans la nappe de la Loire, est une piste qu’il a fallu abandonner : « Nous avons discuté avec eux pour qu’ils nous vendent des mètres cubes pendant la sécheresse, mais eux aussi sont ric-rac, même avec la Loire, alors c’est compliqué. Quant à la recherche de nouvelles ressources à capter, elle pose la question du coût des stations de traitement, alors que nos réseaux et stations arrivent à obsolescence : refaire une station, c’est un coût de 1 à 2 M€, et nous devons aussi renouveler notre réseau, dont les parties les plus anciennes ont 70 ans. On arrive à remplacer 2 à 3 km de canalisations par an, et notre réseau en fait 480… »
Les responsables du SIAEP regardent désormais vers le Bazois, dont les nappes nichées dans les calcaires du jurassique font l’objet d’une étude initiée dans le cadre du Plan départemental de la ressource en eau et financée par l’Agence de l’eau Loire-Bretagne. La connaissance de ce « super-gisement », dit des calcaires du Nivernais, qui s’étend sous les deux-tiers de la Nièvre, pourrait en améliorer la gestion, dans l’optique d’un partage de la ressource au bénéfice des secteurs les plus fragiles.
Autre thème de réflexion suggéré par Fabien Bazin, la création d’un syndicat départemental de l’eau – sur le modèle du SIEEEN (2) – mérite d’être creusée, selon Guy Roy : « Nous pourrions avoir davantage de moyens humains et matériels. » Histoire de partager les problèmes, les bonnes pratiques et la recherche de solutions, la réactivation des réunions de présidents de SIAEP (ils sont 26 dans la Nièvre) serait un pas dans la bonne direction, assure le président du Département : « Il faut être moins fragmentés, avancer comme un pack de rugby, notamment pour faire bouger les Agences de l’Eau. »
1. Ont également participé à la réunion Stéphanie Robinet, directrice générale adjointe de l’aménagement et du développement des territoires ; François Thomas, chef du service Eau ; Stéphane Bénédit, directeur de cabinet.
2. Syndicat intercommunal d’énergies, d’équipement et d’environnement de la Nièvre.