En compagnie de Fabien Bazin, président du Département, d’élus et de techniciens, le préfet Daniel Barnier a testé l’exceptionnel pouvoir d’attraction des voûtes de La Collancelle et des murailles végétales de la Petite Amazonie, un site majeur du canal du Nivernais que le représentant de l’Etat a découvert à bord du bateau-promenade d’Aquafluvial, L’Art du temps. Une immersion appréciée dans un chef-d’œuvre patrimonial que le Département, les syndicats mixtes d’équipement touristique et les collectivités locales souhaitent valoriser davantage. Une négociation est en cours avec Voies navigables de France, organisme d’État, pour y parvenir.
Debout à l’avant de L’Art du temps, le préfet Daniel Barnier saisit la beauté de l’instant sur l’écran de son smartphone. Dans son silence de propulsion électrique, le bateau promenade fend l’eau calme du canal et s’avance au milieu d’une nef végétale. Taillée dans la colline pour franchir la ligne de partage des eaux entre Loire et Seine, la profonde tranchée des voûtes de La Collancelle a laissé la nature coloniser ses hautes rives. Buissons, ronces, et arbres refermant le ciel sous leurs frondaisons ont donné à cette portion de canal entre les tunnels de La Collancelle, Mouas et Breuilles le surnom de « Petite Amazonie ».
Bouche bée, le préfet écarquille les yeux devant le spectacle, regarde les longs doigts des lianes tomber de l’entrée d’une voûte et glisser sur les vitres du bateau. A ses côtés, tenant la barre de L’Art du temps, « capitaine Fred », 30 ans d’allers-retours entre Baye et Port-Brûlé au compteur, confie sa fascination insubmersible pour ces 4 km d’exception : « Chaque jour, je trouve quelque chose de nouveau. La période automnale, notamment, est magnifique ; le printemps aussi, quand tout commence à reverdir. »
Sous la voûte de La Collancelle, la plus longue avec ses 758 m, Jean-Louis Lebeau, président du Syndicat mixte d’équipement touristique du canal pour sa partie nivernaise(1), rappelle le prix fort de la magie, les forçats envoyés au XVIIIe siècle fracasser le terriblement dur porphyre pour creuser le tunnel, en y laissant leur santé et, pour beaucoup, leur vie. Le guide de circonstance détaille l’histoire du canal créé pour nourrir Paris, ses caractériques (174 km entre Decize et Auxerre, dont les deux tiers dans la Nièvre), et surtout son impact économique : 6 M€ par an pour le tourisme fluvial, 3 M€ pour la véloroute. « Sans le canal, beaucoup de commerces seraient fermés dans les communes riveraines », précise Jean-Louis Lebeau.
En compagnie de Fabien Bazin, président du Conseil départemental, de Michèle Dardant, conseillère départementale, d’élus et de techniciens, Daniel Barnier mesure au fil du lent aller-retour le rôle central du « plus beau canal de France » dans l’histoire et dans la vie de la Nièvre. Dans son avenir, aussi : bénéficiant d’une concession pour la section entre Cercy-la-Tour et Sardy-lès-Epiry, le Département négocie avec Voies navigables de France (établissement public sous tutelle de l’État gérant 6 700 km de réseau navigable) pour élargir l’accord à l’ensemble du tracé, afin de développer l’attractivité d’un canal plus connu des plaisanciers du monde entier que des Français, voire des Nivernais.
Autre enjeu de la discussion avec VNF, le déclassement du patrimoine public fluvial des maisons éclusières et de la Maison des ingénieurs de Baye (un imposant bâtiment du XVIIIe à l’abandon depuis un siècle) donnerait aux collectivités locales et aux investisseurs privés les moyens de renforcer l’offre de services, l’hébergement, la restauration, les activités culturelles, etc. insuffisamment présents le long d’une voie fréquentée chaque année par des dizaines de milliers de touristes.
1. Etait également présent Yves Vecten, son alter ego pour l’Yonne.