Réunie à Nevers aujourd’hui et demain pour les 35es Assises nationales de l’aide aux victimes, la Fédération France Victimes a profité de la venue du Garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti, pour demander des moyens renforcés et la mise en place d’une politique interministérielle face à l’inflation des violences intrafamiliales. Un phénomène auquel n’échappe pas la Nièvre, dont les acteurs de l’aide aux victimes (parmi lesquels Fabien Bazin, président du Département) ont alerté le ministre sur le manque de moyens de l’Unité médico-judiciaire.
Venues de toute la France, les associations du réseau France Victimes sont à Nevers pour les 35es Assises nationales de l’aide aux victimes, à La Maison, sur le thème « Santé et justice : une nouvelle ambition au service des victimes ? ». Les travaux ont été ouverts mardi matin en présence du Garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti, attentif aux « doléances » exprimées par Jérôme Moreau, président de France Victimes 58, et par Maryse Le Men Régnier, présidente de la Fédération France Victimes (130 associations, 1 500 salariés, 350 000 victimes prises en charge chaque année).
« Aucune victime ne doit rester sans solution, aucune victime ne doit rester seule », a martelé Jérôme Moreau, citant Confucius (« il vaut mieux allumer des lumières que maudire les ténèbres ») pour mieux appeler à une véritable « politique publique d’aide aux victimes » et à une coordination interministérielle. Une demande relayée par Maryse Le Men Régnier, qui revendique également « des moyens renforcés » pour accompagner un nombre croissant de victimes – 21 000 mineurs et 80 000 femmes victimes de violences conjugales accompagnés par France Victimes en 2021. « C’est au regard de l’attention portée aux victimes qu’un Etat de droit se définit », a conclu la présidente, longuement applaudie.
A la déclaration de Fabien Bazin : » Il me semble que vous avez entendu nos doléances maintenant nous attendons des actes ! « , Eric Dupond-Moretti assure du soutien massif et croissant de (son) ministère.
Avec quelques chiffres à l’appui : des ordonnances de protection accélérées et en hausse de 150 %, des téléphones grave danger (TGD) passés de 1 000 à 4 000 en quelques années, avec l’objectif « d’être à 5 000 à la fin de l’année », et 720 bracelets anti-rapprochement « d’une redoutable efficacité » depuis leur lancement en septembre 2020 : « Grâce à ces outils de protection, des vies sont sauvées chaque jour. » Un satisfecit aussitôt relativisé : « Beaucoup a été fait, mais beaucoup reste à faire. »
Confirmation lui en a été donné quelques minutes plus tard, lors de la table ronde consacrée au sort de l’Unité médico-judiciaire (UMJ) de Nevers. Ouvert au Centre hospitalier de l’agglomération de Nevers, grâce à un partenariat avec le tribunal et France Victimes 58, ce service accueille des victimes de violences pour des constatations médicales (certificat) effectuées par un médecin légiste et un accompagnement juridique et social assuré par une salariée de France Victimes 58. « Le dispositif est sous-dimensionné par rapport aux besoins et à l’augmentation des violences intrafamiliales », a souligné le procureur de la République, Alexa Carpentier. « Le médecin légiste est également urgentiste au CHAN et il ne peut être présent à l’UMJ qu’une journée par semaine. Il faudrait que l’unité soit ouverte cinq jours par semaine car il y a de plus en plus de violences et de signalements, les vagues successives arrivent et nous n’avons pas les moyens d’y répondre, même si le département a l’habitude de très bien savoir gérer la pénurie. Le nombre de prises en charge est en hausse de 23 % sur ce début d’année, et cette hausse est en deçà de tout ce que nous ne voyons pas ; il y a des trous dans la raquette. »
Fabien Bazin a appuyé le diagnostic, insistant sur les difficultés d’accès inhérentes à un département rural, sur « l’effondrement du système hospitalier » et sur la méconnaissance des droits des victimes : « Il faut traiter globalement la question de la ruralité avec les maires, les associations. Elle n’est pas dans les radars des politiques publiques. » Eric Dupond-Moretti a demandé au procureur de lui « faire remonter un projet ficelé pour avoir un financement », et il s’est engagé à transmettre les besoins de temps médical au ministère de la Santé.
Retrouvez le Discours de Fabien Bazin