« Malgré les défis, nous ne sacrifierons pas des pans entiers de nos politiques publiques »
Réunis lundi 17 février en session plénière sous la présidence de Fabien Bazin, les conseillers départementaux ont mené le débat d’orientations budgétaires, prélude rituel au vote du budget 2025, programmé le 14 avril prochain. Exercice de plus en plus compliqué chaque année, en raison notamment des choix gouvernementaux, l’équilibre des finances du Département confine à un équilibrisme que les élus de la majorité ont dénoncé. Tout a été mis en œuvre pour continuer à garantir cette année les « services publics de proximité » attendus par les Nivernais.
Une facture pour faire payer l’État
La facture est symbolique, mais les montants sont réels. 25,4 millions d’euros de dépenses de solidarité sous-compensées, 7,95 millions de « mesures imposées par l’État », 6,1 millions de TVA non-compensés : soit un impayé de 39,45 millions dans les finances du Conseil départemental en 2024. Le fac-similé, imprimé en grand format et adressé à Emmanuel Macron, a été exposé dans la salle François-Mitterrand, durant toute la session plénière consacrée au débat d’orientations budgétaires, lundi 17 février.
Le temps d’une interruption de séance, les élus de la majorité ont posé, gravement, ceints de leur écharpe, sur le perron de l’Hôtel du Département, avec cette facture qui illustre l’impossible quadrature du cercle budgétaire imposée par l’État : maintenir un service public de proximité et de qualité pour tous les Nivernais, en subissant une hausse des dépenses et une baisse des recettes.
« Tout service public est une victoire de l’intelligence humaine, une conquête de la liberté », a rappelé le président du Conseil départemental, Fabien Bazin, citant Jean Jaurès en conclusion de son discours de session. Un discours ouvert sur un constat alarmant : « Les finances de tous les Départements sont attaquées. Le budget 2024 se clôt dans la douleur, et nous faisons face à des difficultés croissantes, dictées par des choix politiques qui mettent en péril notre capacité à garantir des services publics de proximité. »
Pointant le désengagement de l’État, qui reporte ses dépenses sur les Départements dont il fait ses « prêteurs » malgré eux, Fabien Bazin a souligné la complexité grandissante de l’équilibre budgétaire pour une collectivité qui, n’ayant plus la possibilité de lever l’impôt, n’a plus la maîtrise de ses recettes : « Cela fait trois ans que nous faisons des efforts, que nous réduisons l’endettement, les frais de fonctionnement, que nous lissons les investissements. Et dans le même temps, l’État nous doit 39,5 millions d’euros pour la seule année 2024. Mais malgré les défis, nous avons pris la décision de ne pas sacrifier des pans entiers de nos politiques publiques. Notre ambition est de garantir le rebond de la Nièvre. Chaque jour, nous mesurons l’action du Conseil départemental dans les parcours de vie, et dans la vie du territoire. »
Ils ont dit
Blandine Delaporte, 1ère vice-présidente et présidente du groupe majoritaire Vivre la Nièvre écologique et solidaire : « Cette année, la coupe est pleine. Je le dis avec gravité, mais aussi avec colère. Je n’ignore pas que la colère est mauvaise conseillère, mais elle est salutaire lorsqu’il s’agit de ne pas accepter l’inacceptable ! Le sort réservé aux collectivités actuellement est, justement, inacceptable. Nous ne pouvons plus tolérer ce double langage de l’État, qui d’un côté siphonne nos recettes, ou bien encore nous promet la compensation à l’euro
près de tout nouveau transfert de compétence, et de l’autre côté un État qui nous laisse régler ses ardoises ! (…) Nous allons donc aujourd’hui, solennellement envoyer la facture au Président de la République, avec accusé de réception et avec commandement de payer afin d’obtenir le remboursement des dettes que l’État a contracté auprès des Nivernais et des Nivernaises.
Je terminerai en précisant que nous pouvons bien entendu accorder à l’État des facilités de paiement, un “trois fois sans frais” par exemple. »
Daniel Barbier, vice-président en charge des finances : « Nonobstant une stabilisation démographique avérée, malgré des efforts de gestion importants, il est constaté une croissance subie des dépenses de fonctionnement : + 6,2 % en 2023, + 9,9 millions d’euros en 2024. Il faut dire que notre collectivité a fait de son mieux pour rendre le plus agréable possible, le quotidien des Nivernaises et des Nivernais, notamment les plus fragiles : les frais d’hébergement des personnes handicapées mobilisent plus de 29 millions d’euros (+ 9,03 %), l’APA également (+ 3 %)… Bref les dépenses liées à l’autonomie augmentent de 6 % et atteignent 94,9 millions d’euros soit + 5,7 millions d’euros impactés par diverses mesures réglementaires imposées et compensées que partiellement (47,8 % pour APA et 45,8 % pour PCH). Le Département a même payé des factures à la place des autres, en particulier le coût des décisions prises par l’État sans compensation : loi Taquet, revalorisations successives du SMIC, augmentation d’un point du taux de cotisation patronale de la CNRACL, etc. Grâce aux efforts conjugués de chacun, la masse salariale totale a pu être contenue avec une légère baisse de 0,7 %. (…) Côté recettes, la réponse est le malheur de la question ! Elles ne progressent que de 2,4 %. (…) Conséquence : le dénominateur commun de ces données amène à constater une dégradation de l’épargne qui contraint à limiter le niveau d’investissement afin de préserver le résultat de clôture sans recouvrir plus avant à l’emprunt, l’épargne nette flirtant à zéro. »