Dans les Mardis du climat, nous avons déjà présenté plusieurs espèces de la faune sauvage touchées par le changement climatique. Perceptibles, ces bouleversements font d’elles des sentinelles pour notre espèce humaine. Après le castor, le geai des chênes et le ver de terre, voici le cerf, et son drame.
Une étude européenne, menée par l’Université suédoise des sciences agricoles avec le renfort de l’INRAE (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement), fait le bilan de 20 années de recherche sur les effets du changement climatique sur les populations d’ongulés sauvages d’Europe, d’Asie et d’Amérique du Nord.
Si le cerf en est la « figure » la plus connue, c’est toute la grande famille des ongulés qui a été observée : l’élan, le chevreuil, le wapiti, le cerf élaphe, le cerf sika, le daim, le cerf de Virginie, le cerf mulet, le caribou et le renne.
Mais penchons-nous sur le cerf européen, que l’on trouve également dans la Nièvre. On pourrait penser que l’augmentation globale des températures, avec des hivers plus doux, aurait des effets bénéfiques pour ces animaux. En effet, ils dépensent moins d’énergie pour se réchauffer et affronter les grands froids, et peuvent aussi trouver plus facilement leur nourriture.
Mais cette douceur hivernale anormale et le décalage des saisons peuvent avoir des effets négatifs. Une chaleur trop intense indispose en effet les populations de cerfs, et la recherche de point d’eau peut s’avérer problématique. Ils sont plus facilement exposés aux parasites, au risque d’incendie, y compris dans des massifs épargnés jusqu’à aujourd’hui, et sont susceptibles de modifier leurs heures de nourrissage et de déplacement. Tout cela constitue un stress supplémentaire qui peut impacter leur santé.
Un exemple : la migration du cerf
En France, des migrations dites “verticales” sont observées dans la vallée de la Maurienne (Savoie) et dans le Parc national des Cévennes. Les cerfs migrent au printemps vers des zones de plus grande altitude, à la suite de la fonte des neiges, puis font l’inverse à l’automne ; ils peuvent aussi effectuer des migrations de versant à versant. Ce sont certes de “petites” migrations, mais qui sont tout de même susceptibles d’être affectées par le changement climatique.
Des modélisations permettent de dessiner un futur peu engageant pour les populations de cerfs : une reproduction bouleversée qui pourrait voir la période du brame décalée, et un déplacement progressif vers le nord du pays.
Malheureusement, le changement climatique est si rapide que les scientifiques craignent que les cerfs auront du mal à s’adapter à ces nouvelles contraintes. Par ailleurs, leur environnement subira les effets de ces déplacements ; il faut d’ores et déjà anticiper la capacité de la forêt, qui souffre déjà des modifications du climat, à supporter des populations supplémentaires de grands herbivores en certaines zones du pays.