Ouvert en juin, le centre de santé de Médecins solidaires, à Chantenay-Saint-Imbert, a déjà accueilli plus de 1 000 patients, grâce au relais de généralistes venant de toute la France pour poser leurs valises et leurs diagnostics, une semaine chacun. Un véritable baume sur une commune et un territoire fragilisés par la désertification médicale, et une première dans la Nièvre, où le Conseil départemental a fédéré les collectivités et les énergies pour favoriser l’implantation en un temps record.
Entre les premiers contacts et l’ouverture, le 18 juin, du centre de santé de Médecins solidaires à Chantenay-Saint-Imbert, trois mois à peine se sont écoulés. Un petit miracle de planètes alignées aux forceps : « Dans l’action publique, trois mois, ce n’est rien. Un tel projet, en principe, il faut 18 mois à deux ans pour qu’il aboutisse », a rappelé Fabien Bazin, président du Conseil départemental, lors d’une inauguration gentiment euphorique, le 20 septembre. Et de saluer le rôle clé de François Karinthi, directeur général des services du Département, et « cheville ouvrière » de cette accélération du tempo : « Le monde des collectivités est un voyage en absurdie, voire de la folie profonde. Il a fallu mobiliser la mairie, la communauté de communes, qui fait un remarquable travail pour le développement économique, la Région, et l’État. Et cela s’est fait à une vitesse incroyable. »
Les efforts, titanesques, ont été récompensés, à écouter le premier bilan, après trois mois d’activité : plus de 1 000 patients accueillis, dont 350 ont choisi le centre de santé comme médecin traitant. Le remède imaginé par Médecins solidaires et Bouge ton CoQ pour apaiser les maux de la désertification médicale produit ses effets, à Chantenay comme dans les trois centres précédemment ouverts dans la Creuse et dans le Cher : des médecins généralistes qui se portent volontaires pour se relayer, semaine après semaine.
« Quand on est médecin, on ne peut pas rester insensible à la détresse sanitaire », souligne Martial Jardel, généraliste fondateur de Médecins solidaires. « Les médecins ne sont pas des nantis qui se bouchent le nez devant les territoires ruraux. Mais ils ont besoin d’un outil pour venir dans ces territoires ; alors il fallait penser différemment, leur proposer de venir une semaine, avec des conditions de travail parfaites, des coordinatrices qui s’occupent de tout, et un hébergement dans un beau gîte. L’objectif, c’est de faire naître une évidence : quand tu es médecin, tu es solidaire. Nous avons déjà 500 médecins avec nous, et nous faisons le pari que, dans moins de deux ans, nous en aurons 2 000. »
Et de saluer, à son tour, Fabien Bazin : « L’impulsion du Conseil départemental a été déterminante. S’il n’avait pas été aussi proactif, nous ne serions peut-être pas venus. Mais on a senti une impériosité : si on ne venait pas, on se mettait en danger (rire). L’implication du Département a véritablement été hors normes. Elle montre qu’on peut faire de la politique sans jouer à faire de la politique. »
Au centre de tous les regards et de tous les égards, Catherine Bauduin était, cette semaine, le « médecin solidaire » en poste à Chantenay. Généraliste à Blonville-sur-Mer, dans le Calvados, elle a fermé son cabinet pour ces vacances insolites dans la Nièvre : « C’est un département que j’aime beaucoup. Il y a 25 ans, j’ai fait des remplacements à Montsauche, à Corbigny. Un soir, j’ai vu un reportage sur Médecins solidaires, et ça a fait tilt tout de suite. » Alors que son quotidien de médecin est envahi par les tâches administratives, la prise en charge de tous ces à-côtés parasitaires par les coordinatrices a transformé sa semaine de travail à Chantenay en véritable bouffée d’air : « Pouvoir se concentrer uniquement sur le soin, sur le patient, c’est un luxe », sourit-elle, ravie de l’expérience. « Je suis prête à revenir trois ou quatre fois par an. »