Entre le Conseil départemental et les centres sociaux de la Nièvre, les liens ont la force de l’évidence autour d’un dénominateur commun : l’attention portée aux habitants, et notamment aux plus fragiles, qu’ils soient dans la toute petite enfance et dans le grand âge. Une proximité qui n’empêche pas d’envisager d’autres façons de travailler ensemble, sur la prévention, la citoyenneté, l’illettrisme, etc. Les deux partenaires en ont exprimé l’envie, et même l’impatience, lors d’une vibrante rencontre à Châtillon-en-Bazois.
Ancrés dans les anciens cantons, les 33 centres sociaux nivernais constituent depuis des décennies des phares d’humanité vers lesquels se tournent les habitants de tous âges et de toutes conditions. De ce réseau de chaleur, de solidarité et de bienveillance, le Conseil départemental a fait un allié naturel, presque un jumeau d’action sociale. La relation fusionnelle se nourrit de questionnements, d’évaluations et de mises à jour, au gré des évolutions de la société et des attentes des usagers.
Partenaire des centres sociaux depuis toujours, le Conseil départemental souhaite les associer encore plus à ses missions, qui évoluent elles aussi : plan Santé, plan de lutte contre l’illettrisme, Collège de demain, Territoires zéro chômeur de longue durée, mais aussi l’émergence, dans la dynamique des rencontres d’Imagine la jeunesse, de la « bande des moins jeunes », qui donne un nouveau souffle à l’accompagnement des jeunes dans leurs projets professionnels, leur quête de repères et de sens.
À l’initiative de Fabien Bazin, président du Conseil départemental, et de Frédéric Mestre, président de la Fédération des centres sociaux de la Nièvre, une rencontre a été organisée à Châtillon-en-Bazois, le 21 mai. La plupart des sites y étaient représentés, par leur directeur ou leur président (les centres sociaux ont un statut associatif), aux côtés de nombreux conseillers départementaux et d’agents de l’action sociale de la collectivité.
Sans temps mort, les prises de parole ont mis en lumière les questionnements des centres sociaux autour de leurs moyens, de leurs missions. « Je m’inquiète pour les services aux seniors, qui sont de plus en plus difficiles à pérenniser », explique une directrice. « Les dispositifs se financent par des appels à projets, qui sont assez aléatoires. » Le principe de l’appel à projets cristallise la plupart des critiques, tant il est peu compatible avec les actions sur la durée : « On n’arrive pas à avoir de financements pérennes », pointe un responsable. « J’ai pu obtenir une aide pour un minibus, mais on n’arrive pas à financer le salaire du chauffeur », ajoute un collègue.
Si les centres sociaux ne sont pas en péril, l’équilibre des budgets s’est imposé comme une obsession : « 40 % de mon temps de travail sont consacrés à la recherche de financements », s’émeut une directrice. « Avec les appels à projets, on est dans la course à l’innovation perpétuelle. Cela essouffle les équipes, la direction, les partenaires. J’aimerais passer moins de temps dans mon bureau, et être davantage sur le terrain. »
« Vous pouvez utiliser la puissance du Conseil départemental pour répondre aux appels à projets, pourquoi pas de façon groupée », assure Fabien Bazin., suggérant aussi d’autres pistes de financement, comme les Territoires éducatifs ruraux et le dispositif Notre école faisons-la ensemble pour la jeunesse, ou, pour les seniors, les « deux milliards d’euros » que va débloquer la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).
Par-delà les enjeux budgétaires, ce sont « de nouvelles façons de travailler ensemble » qu’appelle le président du Conseil départemental : « Face à l’addition des crises, nous ne pouvons pas rester atones. Il y a notamment quelque chose à réinventer autour d’un enjeu majeur, le besoin de dialoguer que nous expriment avec force les Nivernais lors des rencontres d’Imagine la Nièvre et désormais d’Imagine la jeunesse. »
L’accompagnement des jeunes et des familles fait partie lui aussi des domaines dans lesquels des partenariats sont à réinventer : « Les travailleurs sociaux du Département sont épuisés », pointe Fabien Bazin. « Que ce soit dans la petite enfance, l’enfance, les mineurs non accompagnés, la parentalité, ils sont confrontés à des crises, des drames, des situations potentiellement explosives. C’est un enjeu majeur qu’il faut prendre en considération. Nous devons voir comment nous répartir cette charge-là, entre nos sites d’action médico-sociale et les centres sociaux. » Une directrice confirme : « Il y a un énorme chantier à ouvrir sur les violences intra-familiales, sexistes et sexuelles, conjugales. »
Des ateliers collectifs associant les salariés des centres sociaux et du Département sont évoqués, pour affermir les liens et améliorer les solutions. Autre piste, « des formations continues partagées » donneraient encore plus de sens à une histoire commune, celle d’un engagement pour l’intérêt général.