Intime et immense, le hall de La Maison, à Nevers, est un espace rare d’expositions dans la Nièvre. La galerie Montchougny épate, cette fois encore, avec Les Forains viennent toujours d’ailleurs, co-réalisée avec la Médiathèque du patrimoine et de la photographie. Saisis dans l’œil de 22 photographes, manèges, stands et cirques chavirent sur les murs, tourbillonnent un maelstrom hypnotique de sensations où domine la mélancolie, essence de la fête déjà enfuie.
C’est un monde en mouvement qui déballe et remballe ses mystères et ses mythes, ses rêves, ses fantasmes. Féerie en transit, paradoxe opaque et pailleté, attirant et insaisissable, l’univers forain livre sa photogénie au regard des spectateurs de La Maison, qui prête jusqu’au 19 décembre le cadre grandiloquent de sa galerie Montchougny à l’exposition Les Forains viennent toujours d’ailleurs. Soit 120 photographies de la fin du XIXe siècle à 2023, piochées dans le coffre aux trésors de la Médiathèque du patrimoine et de la photographie (MPP) par Christophe Vootz, commissaire des expositions de La Maison, et Matthieu Rivallin, adjoint à la responsable du département de la photographie de la MPP.
Aux côtés des Nadar père et fils et de Willy Ronis, des « noms » moins connus du grand public, comme John Batho, Jean-Pierre Favreau, Christine Spengler, saisissent l’ambivalence d’un monde qui oscille sur un fil entre ivresse et tristesse. Fantomatiques, les manèges de Jean-Pierre Favreau, à Rochefort comme à Brighton, exhalent la même mélancolie que les clowns austères de Gérard Uféras ou l’éléphant du petit cirque de Dolores Marat, à l’œil entouré d’un noir de deuil. À l’antithèse chromatique, les images de John Batho s’enivrent de l’abstraction acidulée des machines tournoyantes.
« C’est un monde qui fascine les photographes depuis toujours, car il provoque un mélange d’émerveillement et de nostalgie », explique Christophe Vootz. Après un cycle d’expositions exaltant les talents d’ici, Les Forains viennent toujours d’ailleurs inaugurent une nouvelle approche, voulue par Jean-Luc Revol, directeur de La Maison, comme un lien tissé entre la programmation et la galerie Montchougny. Du 28 novembre au 2 décembre, le spectacle Foraine, de Jeanne Mordoj, sera en effet l’un des événements de la saison, en transformant la grande salle en « arène foraine » dont les baraques et les créatures mi-humaines mi-animales, monstrueuses et improbables, renverront immanquablement au mythique Freaks de Todd Browning.
Les Forains viennent toujours d’ailleurs, à voir jusqu’au 19 décembre.
En savoir plus : https://maisonculture.fr/spectacle/les-forains-viennent-toujours-d-ailleurs