Si certaines habitudes de consommation culturelle ont changé depuis le début de la crise sanitaire, avec des sorties plus ciblées sur les valeurs sûres, les festivals résistent au phénomène de la « stratégie du canapé », selon Roger Fontanel, directeur artistique du Nevers D’jazz Festival. La 36e édition, du 5 au 12 novembre, garde le cap sur l’équilibre entre chemins connus et défrichage, confort et aventure, et mise sur le bonheur sans pareil du spectacle vivant pour maintenir son pouvoir d’attraction.
A l’instar de son affiche polychrome, tirée d’une toile de Daniel Humair (voir encadré), qui manie le pinceau aussi brillament que ses baguettes de batteur, le 36e D’Jazz Nevers Festival est… d’Humair éclatante et joviale, en contraste avec une époque aux teintes assombries par les nappes de crise – sanitaire, climatique, énergétique, diplomatique, pré-nucléaire, etc. Après deux années sous pression pandémique, Roger Fontanel, directeur artistique, salue même un « retour à la normale », en croisant les doigts pour écarter une 8e vague de Covid d’ici la 36e édition, programmée du 5 au 12 novembre : « On espère faire briller 36 000 étoiles dans les yeux du public. »
Des yeux à cajoler. Deux années de sorties contraintes, sous masque et jauge, ont émoussé le sens de la fête, ébréché l’insouciance et bridé les soirées impulsives. « Le climat est encore un peu marqué par la crise, avec de grosses modifications du comportement du public, le développement de la stratégie du canapé », constate Roger Fontanel, citant une étude du ministère de la Culture : « Les gens se déterminent davantage pour les événements et pour les valeurs sûres. Les festivals semblent moins concernés, on sent toujours une dynamique, d’ailleurs le public était là très largement pour notre édition de 2021. L’étude du ministère montre aussi que les festivals sont de grands vecteurs de démocratie culturelle, qu’ils brassent un public très large. »
Bref, l’étude a plutôt donné le sourire à l’équipe de D’Jazz, confortée dans sa politique tarifaire « très avantageuse » qui permet par exemple de s’offrir, à l’heure du déjeuner, un festin de brio et d’audace pour le prix d’un demi-burger sans surprise (3 ou 5 €). Pas de raison, non plus, de dévier d’une « slack line » artistique qui promène le public entre géants du jazz (Daniel Humair, donc, mais aussi Louis Sclavis, Dave Holland, Eric Truffaz et Rhoda Scott à la tête d’un ébouriffant Lady All Stars) et nouvelles têtes chercheuses (Airelle Besson, Elise Dabrowski, Grio).
Fidèlement reflétée dans chaque édition du festival, l’ouverture atavique du jazz à tous les arts fait cette année la part belle au texte, avec M. Golouja, collaboration d’Olivier Broda (Théâtre du Temps pluriel) et du compositeur Clément Janinet autour d’une nouvelle de Branimir Scepanovic, La Clameur des lucioles (Erik Truffaz et la lumineuse Sandrine Bonnaire sur le « récit poétique » de Joël Bastard) et Noces translucides (composition de François Corneloup inspirée d’une photo de Guy Le Querrec et texte de Jean Rochard interprété par la comédienne Anne Alvaro). Sans oublier le passage d’ovnis tels que Nout, aux frontières du punk, Supersonic et Effet Vapeur.
Programme complet sur www.djazznevers.com Billetterie sur le site internet ou dans un nouveau point de vente, au 48, rue François-Mitterrand à Nevers (du 20 septembre au 4 novembre) puis au Théâtre municipal durant le festival.
Tous les concerts se déroulent à La Maison, au Théâtre municipal et au Café Charbon.