Jusqu’à la mort, accompagner la vie, c’est le credo de l’association laïque Écoute et Vie, qui intervient dans ces vastes pans obscurs de l’humanité que le regard fuit : la maladie grave, le grand âge qui ronge, l’ombre de la fin. Ses bénévoles, formés et soutenus, apportent une inestimable présence face à la solitude et à la peur. Leur parole apaise, leur regard réchauffe, leur silence ouvre la voie de la confidence. Lumière sur ces gardiens de la fraternité.
Sans bruit, ils portent la flamme de l’humanité jusqu’au bout de la nuit. Ni héros ni saints, les bénévoles d’Écoute et Vie incarnent pourtant une conception chimiquement pure, et laïque, de l’altruisme : être là où la solitude souvent sévit, aux côtés des personnes en souffrance, gravement malades, âgées, parfois en fin de vie, « où les regards souvent se détournent », comme le précise Jean-Louis Delboy, président de l’association nivernaise depuis quatre ans.
Intervenant dans une douzaine d’établissements hospitaliers et maisons de retraite, les 25 bénévoles nivernais (des femmes, dans leur immense majorité) ont noué d’indispensables relations de confiance avec les responsables des soins, qui désignent les personnes à accompagner. Avec ferveur, Jean-Louis Delboy explique le rôle des bénévoles : « On écoute pour soulager la souffrance, parfois même la douleur ; écouter les doutes, les peurs, les interrogations, les espoirs, faire que chaque personne se sente membre de la communauté humaine, digne d’intérêt, digne d’être regardée et écoutée. »
Respectant la confidentialité des échanges, chaque accompagnement est unique, se tisse dans la parole, le silence, le regard, la simple chaleur de la présence : « La personne peut pleurer, se laisser aller, ce qu’elle ne peut pas faire devant son conjoint ou ses enfants. Il y a aussi le besoin de rembobiner le film de sa vie, de le visionner avec quelqu’un, pour lui donner sa richesse. Ces moments demeurent avant tout des moments de vie et de partage. »
« Ce n’est pas un bénévolat anodin »
La complexité de la mission, en équilibre gracile au-dessus du vide, justifie le soin apporté au recrutement, à la formation et au soutien des bénévoles : « Il y a plusieurs étapes avant d’être bénévole : je rencontre les candidats, puis ils s’entretiennent avec notre psychologue. Souvent, l’envie d’intégrer Écoute et Vie se produit après un deuil ; on conseille aux gens d’attendre un peu. Ce n’est pas un bénévolat anodin. »
À la formation initiale d’une quarantaine d’heures, dispensée sur quatre mois, s’ajoutent une formation continue et surtout des groupes de parole entre bénévoles, d’une heure trente une fois par mois, animés par une psychologue : « Chacun peut parler de ses accompagnements. On est là pour soutenir, pas pour souffrir. Vous ne pouvez pas ne pas vous attacher à quelqu’un. Il y a des rencontres que je n’oublierai jamais. Un visage qui s’illumine quand on entre dans la pièce, une main qui ne vous lâche plus. »
Jean-Louis Delboy est conscient que l’association sème des étincelles d’humanité dans une nuit trop noire : « Avant, nous accompagnions 2 500 personnes par an. Le Covid a cassé la dynamique, qui est longue à redémarrer. » Objectif, doubler l’effectif pour couvrir les zones blanches comme Decize ou La Charité, se développer encore sur Cosne et Nevers. »
Pour l’association, la Nièvre ne peut se limiter au val de Loire : « Trouver 6 à 10 bénévoles dans chaque canton de la Nièvre, sans exclusion, est un objectif atteignable. Nous devons contribuer à porter un autre regard sur la maladie et le grand âge, plus inclusif. Il nous faut refuser de ne voir que l’aspect médical de la maladie et du grand-âge, même s’il faudra toujours et encore développer les soins palliatifs. L’accompagnement familial que nous connaissions n’est plus aussi présent. Accompagner les personnes dans ce temps de la maladie et du grand âge reste essentiel, et se doit de devenir de la responsabilité de la société, et de chacun de nous. Notre association peut, de par son expérience, fédérer les bonnes volontés. C’est à ce titre que nous pourrons faire de la Nièvre un territoire d’humanité, de liens, et de solidarité. »