Nouveauté de l’année scolaire, le stage de deux semaines en juin pour les élèves de 2nde est une actualité au parfum angoissant d’urgence qui s’est invitée en plein cœur de la rencontre d’Imagine la jeunesse au Café Charbon, à Nevers, mardi 2 avril. La « galère » des offres trop rares, en prélude au stressant marathon de la première embauche, a inspiré la plupart des interventions des jeunes, qui ont trouvé chez leurs aînés non seulement une écoute bienveillante, mais aussi des réponses concrètes, des pistes et des postes.
Fidèle d’Imagine la Nièvre ! depuis le lancement en 2022, Soraïa a vécu l’an dernier la « difficulté » à trouver un stage quand elle était en 3e. Nouvelle année scolaire, en 2nde, nouvel établissement, le lycée Raoul-Follereau, et nouvelle embûche, qu’elle expose dans la grande salle du Café Charbon, cadre lui aussi fidèle des rencontres d’Imagine la jeunesse : « Je dois trouver un stage de deux semaines en juin, et c’est vraiment compliqué. Il y a bien des plateformes qui existent, mais elles proposent peu d’offres dans la Nièvre. Beaucoup de jeunes font des stages par dépit, parce qu’ils ne trouvent pas d’offre dans le domaine qu’ils souhaitent. Il faudrait montrer aux entreprises qu’il ne faut pas avoir peur de prendre des jeunes en stage ; ça peut déboucher sur une alternance, puis sur un emploi, donc ça peut leur rapporter à elles aussi. »
Chaleureusement applaudi, le témoignage de Soraïa donne le ton d’une soirée qui fait la part belle à ce chaînon manquant entre la jeunesse et le monde du travail. Parmi la centaine de personnes présentes, plusieurs jeunes s’enhardissent, confient la complexité de leur parcours vers les études, l’emploi. Le sentiment d’une défiance, d’un manque d’écoute, qui s’enracine plus tôt. Venu avec de jeunes collégiens du quartier des Courlis, Galaad Gonzales, animateur du Centre socioculturel de la Baratte, raconte leur aventure de Pirate Baratte, qui les transforme en mini-journalistes auteurs de podcasts, d’interviews, d’articles sur des sujets ambitieux, comme le harcèlement, le consentement, les droits de l’enfance : « C’est un projet qui leur permet de faire des choses merveilleuses. Si on veut un meilleur engagement des jeunes, il faut valoriser ces choses-là. On donne la parole aux jeunes, c’est bien, mais c’est uniquement sur des moments où on dit « OK, là vous avez le droit de parler ». Et le reste du temps, ce sont les adultes qui parlent et décident. » Ahmed, 12 ans, acquiesce : « On se sent écouté, important. »
Collégiens, lycéens, étudiants, salariés, en recherche d’emploi ou en création d’entreprise tissent, comme à chaque rencontre, l’étoffe chatoyante d’une jeunesse « conscientisée », altruiste et ouverte. Une énergie qui séduit leurs aînés, membres ou non de la « bande des moins jeunes ». Président de la Chambre des métiers et de l’artisanat, abonné lui aussi à Imagine la Nièvre !, Sébastien Thomas s’avoue bluffé par les témoignages « inspirants » et pointe la force numérique des nouvelles générations : « Dans nos entreprises, on a besoin de leviers de communication sur les réseaux sociaux, et on ne les maîtrise pas. Vous pouvez nous aider. Alors, envoyez-nous vos CV, vos lettres de candidature, même s’ils ne sont pas bien faits. Et n’hésitez pas à nous dire si vous avez des compétences dans le numérique. On est convaincu que la jeunesse va nous apporter des réponses à des questions qu’on ne connaît pas. »
Ils ont dit
Anna-Marie
Lycéenne à Raoul-Follereau, membre de l’Atelier Sciences Po, élue au Conseil municipal des jeunes de Nevers
« Une réunion comme celle-ci montre que les jeunes sont ancrés dans leur département et qu’ils ont envie d’y faire des choses. On voit qu’ils sont attachés à la Nièvre. Moi, par exemple, j’aime la nature de ce département, ses villes à taille humaine où il est facile de créer des liens. Mais les jeunes sont convaincus qu’on ne les écoute pas, alors c’est important de leur permettre de s’exprimer. »
Océane
En cours de création d’entreprise
« Avant, j’étais chauffeur de poids lourds, mais j’ai du mal avec les patrons (sourire), alors j’ai décidé de monter ma boîte. Mon projet ? Créer des activités pour les jeunes. Il a fallu que je farfouille pas mal avant de trouver la BGE (Boutique de gestion, qui accompagne les créateurs d’entreprise). Et ma deuxième conseillère Pôle emploi m’a bien soutenue. Mais je trouve quand même qu’on n’est pas très bien aiguillés. Pour avoir des infos, ça passe beaucoup par les réseaux sociaux, le bouche-à-oreille. J’ai fait en sorte d’allier les jeunes et les anciens dans la fête de mon village, Torteron, dont je m’occupe ; ce sont des choses qu’il faudrait multiplier. »
Justine
Inscrite à l’École de la 2e chance
« L’École de la 2e chance, c’est un centre de réinsertion professionnelle. Dit comme ça, ça fait un peu peur. On est censés partir en stage toutes les deux semaines, mais on n’en trouve pas. Beaucoup d’entre nous galèrent. Il faudrait créer un site où toutes les entreprises mettraient leurs offres. Ce serait vraiment cool, ça nous éviterait de taper à toutes les portes et de nous prendre des « non ». »
Charles
En cours de création d’entreprise
« Je suis parti de la Nièvre pendant quatorze ans, pour travailler entre autres dans des start-up, à Montreuil. J’ai décidé de revenir dans le département, pour ouvrir un restaurant, prochainement, à Nevers. C’est important de rappeler que la Nièvre a ce profil, cette capacité à changer les choses sur son territoire. J’entends que les jeunes cherchent des stages, moi je cherche un apprenti en cuisine, pour septembre. Et si des lycéens veulent faire leur stage de deux semaines en communication, ils sont les bienvenus. »
Antoine
Chef du service Citoyenneté du SDIS (Service départemental d’incendie et de secours)
« C’est très intéressant de voir autant de jeunes qui veulent s’engager. Il ne faut pas hésiter à pousser la porte de nos casernes. On peut être volontaire à partir de 16 ans, on a sept sections de jeunes sapeurs-pompiers (JSP), et on prend des stagiaires de 3e, on va aussi créer trois places d’alternants. L’ouverture à la jeunesse, c’est une évidence pour nous, au SDIS. Et je dois dire que je suis bluffé de voir des jeunes qui prennent le micro devant une salle pleine, car ce n’est pas un exercice facile. »