À l’initiative du Conseil départemental et de son président Fabien Bazin, les bénéficiaires de bourses d’études de médecine et de santé ont été conviés à un temps d’échange… à cœur ouvert, dans l’internat du Centre hospitalier de l’agglomération de Nevers. Une quinzaine d’étudiants ont pu exposer aux élus présents leurs impressions de la Nièvre, de ses attraits et de ses freins. Entre radiographie et prise de pouls, la rencontre a été riche d’enseignements pour tous.
La table de ping-pong et les canapés ont été poussés dans un coin pour faire place à un grand cercle de chaises, qui s’élargit au fil des arrivées. À la façon d’un groupe de parole, élus, médecins, étudiants en médecine et autres professions de santé, internes, etc. se côtoient dans le vaste espace commun du nouvel internat (1) du Centre hospitalier de l’agglomération de Nevers (CHAN). Parler, en toute franchise, de la Nièvre, tel est l’objet de ce temps d’échanges voulu par le Conseil départemental et son président, Fabien Bazin (2), avec les boursiers de la collectivité (voir encadré) : « L’objectif de cette rencontre, c’est de savoir comment vous vivez votre parcours d’étudiant, comment on peut s’organiser pour vous permettre d’avoir une vie professionnelle qui va bien. On souhaite savoir ce qui, selon vous, va bien, ce qui ne va pas bien, ce que vous attendez de nous. »
Animée par Sylvain Vereycken—Lazou, ex-président de l’Association des jeunes médecins généralistes de Bourgogne et approchant du terme de son cursus marathon, la discussion s’enclenche naturellement. Premier thème abordé, le travail du conjoint, souvent polydiplômé lui aussi : « Je suis revenu dans la Nièvre, je suis très content, mais je ne sais pas si je vais pouvoir rester, parce que cette question de l’emploi du conjoint, ça va être chaud », explique un étudiant, dont l’épouse est « neurobiologiste » et ne voit pas de poste disponible « à 300 km à la ronde ».
Etudiante installée dans le Morvan, une mère de deux jeunes enfants, dont le petit dernier somnole dans les bras de son père, évoque l’ambivalence nivernaise de l’attraction et du repoussoir dans son orientation : « Au départ, je me projetais sur Clermont-Ferrand, où je fais mes études, mais la bourse du Conseil départemental m’a fait prendre la décision de revenir plus vite dans la Nièvre. Mais ce qui peut être un frein, c’est la démographie médicale : je n’ai pas très envie de rester toute seule, c’est plus facile d’avoir un réseau autour de soi, de pouvoir parler entre professionnels de santé. J’avoue que cette démographie médicale me fait un peu peur, en tant que jeune médecin. » A un an de la fin de son internat, la jeune femme envisage de se tourner vers la médecine salariée : « Je veux me concentrer sur le soin, je n’ai pas très envie de commander mon papier d’imprimante. »
Un champ des possibles professionnels
De l’aveu des étudiants, la piètre image de la Nièvre renvoyée depuis longtemps à la faculté de médecine de Dijon n’incite pas à tenter l’aventure. Une contre-offensive de séduction in situ est sans doute une des pistes de travail : « On voit des territoires comme Auxerre ou le Pays châtillonnais qui viennent nous rencontrer à Dijon, mais je n’ai jamais vu la Nièvre », reconnaît un jeune homme.
Le département ne manque pourtant pas d’atouts, et pas seulement ceux de la qualité de vie et de la beauté des paysages. D’un point de vue purement professionnel, la Nièvre est un champ des possibles que vante le Dr Thierry Lemoine, généraliste à Nevers depuis vingt ans : « Il y a plus de souplesse dans un département comme le nôtre que dans un département avec un CHU, où tout est cloisonné. Ici, on peut tout espérer, se spécialiser en gériatrie, en oncologie, en diabétologie. On a un exercice beaucoup plus diversifié que celui d’un médecin dans un grand centre urbain. Par exemple, en ce moment, on forme dix médecins à la dermascopie. On peut aussi donner un coup de main aux urgences. Et c’est vrai qu’on n’a pas beaucoup de spécialistes, mais ce sont des gens fantastiques. Quand on les appelle, on peut avoir une réponse en 24 ou 48 heures. Et ils savent qu’ils peuvent aussi compter sur nous. On est tous dans la galère, et l’aide fonctionne dans les deux sens. »
1. Le bâtiment de 1 500 m² peut accueillir 40 internes. Inauguré en mai 2022, il remplace avantageusement l’ancien internat, vétuste et plus petit. Son coût (3,5 millions d’euros) a bénéficié d’une aide exceptionnelle de 200 000 € du Conseil départemental.
2. Étaient également présents Philippe Cordier, ophtalmologiste et élu de Nevers et de Nevers Agglomération ; Eric Guyot, président du Pays Nivernais Morvan ; Olivier Sicot, maire de Varennes-Vauzelles ; Thierry Lemoine, président de l’Ordre des médecins de la Nièvre ; Yannick Chartier, secrétaire général du Groupement hospitalier de territoire de la Nièvre ; François Karinthi, directeur général des services du Conseil départemental ; Johanna Buchter, directrice générale adjointe des Solidarités du Conseil départemental.