Parmi les 444 propositions émises en 2022 lors des rencontres Imagine la Nièvre !, la santé s’est imposée comme la première des priorités pour les Nivernais. Une évidence, tant la raréfaction des généralistes et des spécialistes complique l’accès aux soins. Le Centre de santé départemental, qui salarie des généralistes et autres professionnels, est un des remèdes appliqués par le Conseil départemental. Le site de Nevers a accueilli la troisième visite de terrain de l’Observatoire des citoyens.
Quel accès aux soins pour la Nièvre, aujourd’hui et demain ? L’inquiétude, aussi lancinante qu’un mal de dents, a enflammé chacune des rencontres citoyennes d’Imagine la Nièvre !, au printemps 2022. Deux ans plus tard, sans surprise, la thématique a aiguillé de nombreux membres de l’Observatoire des citoyens jusqu’au Centre de santé départemental de Nevers, rue Albert-Camus, lundi 19 février.
Après une rapide visite des locaux dans le sillage du directeur Jacky Dupuy, les « observateurs » ont décortiqué les actions et moyens mis en œuvre par le Conseil départemental : « On essaie d’apporter des solutions très concrètes à un problème importantissime », explique en introduction Fabien Bazin, président du Conseil départemental. « Actuellement, 17 000 Nivernaises et Nivernais, dont moi-même, sont sans médecin traitant. Si on ne s’aide pas, personne ne le fera à notre place. » Et de citer les bourses aux étudiants en médecine, qui ont permis l’installation de 18 jeunes médecins, et la perspective de 18 autres arrivées d’ici 2030. Déjà à l’œuvre dans la Creuse, avec succès, les Médecins solidaires sont attendus d’ici quelques mois dans la Nièvre.
Lancé en 2022, le Centre de santé départemental a connu une sérieuse avancée, en juillet dernier, avec la reprise des centres de santé mutualistes de VYV3 Bourgogne de Nevers, Imphy et Chantenay-Saint-Imbert. À ces sites s’ajoute le centre de santé de Lormes : « Nous accueillons 3 500 patients à Nevers et Imphy (1), et 500 à Lormes », précise Jacky Dupuy.
Rue Albert-Camus, trois médecins généralistes, divers professionnels (sages-femmes, orthophoniste, psychologue, psychomotricien, etc.) et des secrétaires sont aux… petits soins. L’équipe s’est étoffée d’une infirmière en pratique avancée (IPA), qui a répondu aux questions des visiteurs du soir : « L’objectif est de libérer du temps médical. Les patients voient le médecin une première fois, puis j’assure leur suivi, avec leur accord. C’est intéressant pour eux car j’ai plus de temps que le médecin. Et je fais aussi des visites à domicile. Cela a permis au centre de santé de prendre de nouveaux patients, que les médecins n’auraient pas pu recevoir sans ce poste d’IPA. »
« Les centres de santé comme celui-ci sont des lieux d’expérimentation », souligne Fabien Bazin, rappelant que cette action, outre l’embauche de professionnels de santé, a un coût : « Il y a un déficit de 200 000 € par an que le Conseil départemental va combler. Mais le ministère de la Santé commence à réfléchir à un financement des centres de santé, pour qu’ils soient à l’équilibre. »
(1) L’antenne de Chantenay-Saint-Imbert est provisoirement fermée, suite au départ de son médecin. Des solutions sont à l’étude pour la rouvrir rapidement.
Paroles d’observateurs
« Les médecins généralistes qui travaillent ici étaient en ville, avant. Alors, qu’est-ce que cela change pour les patients ? Qu’est-ce que l’on fait pour les autres ? À quoi cela sert d’avoir un centre de santé s’il ne peut pas s’ouvrir à toute la population du secteur ? Si le Département salarie des médecins pour leur confort, pourquoi pas, mais cela doit aussi bénéficier aux habitants. »
Réponse de Jacky Dupuy : « Depuis la reprise des centres de santé en juillet 2023, la file active des patients accueillis a augmenté. Les médecins qui sont en poste ici ont demandé à augmenter leur temps de travail, notamment pour prendre des patients ayant des affections longue durée. Et l’enjeu, c’est de recruter d’autres médecins. »
Réponse de Fabien Bazin : « On fait appel à des médecins retraités. On va aussi aller chercher des dentistes retraités, pour les salarier. Et à Lormes, nous avons une jeune boursière qui a fait le choix du salariat. Cela va faire du temps médical en plus. »
« On se rend compte que tous les départements sont en compétition pour attirer des médecins. Les efforts pour les faire venir dans la Nièvre sont colossaux. Espérons qu’on arrivera à bien accompagner ceux qui sont déjà sur place. »
« Je ne connaissais pas ce centre, et je ne savais pas qu’il y avait autant de praticiens. Je vais en parler autour de moi, car je connais des gens qui sont obligés d’aller à Moulins pour consulter un psychomotricien, alors qu’il y en a un ici. »
Sylvain Vereycken—Lazou, étudiant en médecine et boursier du Département : « Dans un monde idéal, il faudrait passer 20 ou 30 minutes avec un patient. Mais ce n’est pas possible on n’a pas le temps, c’est 15 minutes au maximum. Il n’y a pas de solution miracle, mais ce qui est sûr, c’est qu’on ne peut plus exercer la médecine comme il y a 40 ans. »