Avec plus de 5 000 km de cours d’eau (dont la Loire et l’Allier) et canaux, ses grands lacs morvandiaux et ses 2 600 étangs, la Nièvre bénéficie d’un patrimoine hydrique diversifié mais inégal sur le territoire et relativement vulnérable. Les effets du changement climatique se font sentir sur la ressource, que le Département s’attache à préserver.
Une multiplicité d’usages qui pèsent sur une ressource en eau déjà fragile !
L’eau est utilisée pour de nombreux usages : énergie, industries, agriculture, transports et loisirs. Elle peut être prélevée (eau potable, industrie, irrigation), déviée (hydroélectricité, canaux) ou directement utilisée (pêche, abreuvement).
Le patrimoine hydrique est morcelé, sollicité par de nombreux usages et impacté par les activités humaines présentes sur le territoire.
Le volume d’eau prélevé chaque année dans la Nièvre est estimé à 116 millions de m³ (moyenne 2014-2019), ainsi répartis :
– alimentation des canaux, 82 millions de m³ (71 %),
– eau potable, 18 millions de m³ (16 %),
– industrie, 10 millions de m³ (8 %)
– irrigation, 6 millions de m³ (5 %).
Les impacts du changement climatique sur la ressource en eau sur le territoire
Le changement climatique vient ainsi s’ajouter aux pressions liées aux activités humaines sur la ressource.
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La disponibilité en eau en baisse
– L’augmentation de l’évapotranspiration induit des débits plus faibles, en particulier en été.
– Les simulations pour l’avenir montrent des étiages de plus en plus sévères et longs.
– Les territoires qui ne sont pas en déficit hydrique aujourd’hui pourraient le devenir.
On risque d’observer un effet de ciseau entre une demande qui risque d’augmenter et une ressource moins abondante, notamment à l’étiage. Il conviendra de s’interroger également sur la disponibilité en eau en dehors de la période d’étiage.
À partir de plusieurs scénarios et modèles, le projet national Explore 2070 (2010-2012) a permis de mettre en évidence des tendances et de faire les projections suivantes :
• Une baisse généralisée des débits moyens inter-annuels (baisse de 25 % à 52 % pour certains cours d’eau).
• Des étiages plus sévères et décalés sur la période automnale. Les débits d’étiage sur la Loire à Nevers devraient diminuer de 10 à 20 % en moyenne à l’horizon 2046-2065.
• Une modification de la saisonnalité des débits est également constatée, avec des débits parfois plus importants en fin d’hiver et au tout début de printemps, en baisse durant l’été et en forte baisse de septembre à octobre. S’il y a peu de risque d’événements intenses en automne, les projections des précipitations indiquent une augmentation de plus de 20 % des pluies au printemps.
• Pour les eaux souterraines, du fait de l’augmentation de l’évapotranspiration, les pluies printanières et estivales seront moins efficaces pour recharger les sols et les nappes (jusqu’à – 20 %) et les capacités de remplissage annuel des lacs, étangs et réservoirs devraient baisser de 5 à 10 %.
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Une augmentation de la température de l’eau
Le projet de recherche ICC-HYDROQUAL (2010) à l’échelle du bassin de la Loire montre pour la Loire et ses affluents :
• une augmentation significative de la température moyenne annuelle de l’eau : + 2,1°C l’horizon 2046-20654 en lien avec une baisse de l’oxygène dissous ;
• un réchauffement de l’eau plus marqué au printemps et en automne, et plus sensible sur la Loire amont et l’Allier.
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Une dégradation de la qualité des eaux
La seule augmentation de la température est déjà un facteur de dégradation de l’état des eaux. Dans les rivières, elle entraîne en particulier une diminution de l’oxygène dissous, indispensable à la vie aquatique. Une température trop élevée des eaux d’une rivière peut donc provoquer à son tour la réduction de la capacité d’auto-épuration des écosystèmes, l’accumulation de nutriments, la croissance accélérée d’algues (eutrophisation) et la disparition de certaines espèces.
Avec des débits plus faibles, la gestion des rejets polluants (assainissement, industries, agriculture) dans les cours d’eau sera encore plus sensible. Cela pourra se traduire par des niveaux de traitement plus exigeants. La baisse des débits entraînera mécaniquement un risque d’augmentation de la concentration en certains polluants : métaux lourds, nitrates, phosphates agricoles ainsi que les hydrocarbures et résidus médicamenteux.
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Des incidences sur l’ensemble des usages
Les nouvelles conditions climatiques favorisent l’eutrophisation, avec toutes les conséquences négatives de la prolifération d’algues toxiques et de certains virus et bactéries pour la vie aquatique (toxicité, manque d’oxygène, moindre transparence de l’eau) et pour des usages de l’eau comme :
– la production d’eau potable,
– l’abreuvement des animaux,
– certains processus industriels,
– la baignade.
L’évolution qualitative prévisible des ressources en eau pourrait conduire à une augmentation des maladies à transmission hydrique (virales et bactériennes).
L’augmentation de la température de l’eau pourra poser problème pour certains usages industriels, comme le refroidissement des centrales nucléaires, qui sont déjà soumises à des contraintes pour leur température de rejet. De même, certaines installations industrielles devront renforcer leurs dispositifs.
Le tourisme, qui constitue un moyen de développement pour certains territoires, est fortement dépendant d’une bonne qualité des eaux, notamment de baignade, tout en étant source potentielle de pollution supplémentaire.
Il en résulte une diversité d’enjeux : inondations, manque d’eau ou encore pollutions.
Le Département agit pour préserver la ressource en eau
Le département de la Nièvre dispose d’une ressource en eau abondante. Toutefois des difficultés concernant la qualité et la quantité de l’eau disponible demeurent, voire s’aggravent, avec le contexte de changement climatique. Le principal enjeu est un risque quantitatif avec en particulier un manque d’eau pour satisfaire les usages et assurer un bon état des milieux aquatiques.
Aussi, le Conseil départemental a choisi de s’investir, en associant l’ensemble des acteurs concernés, pour faire face à cet enjeu.
Suite à sa candidature à un appel à manifestation d’intérêt (AMI) publié conjointement par l’État et l’Agence de l’eau Loire-Bretagne, le Département engagera prochainement une analyse HMUC (hydrologie, milieux, usages, climat) sur le territoire lié aux aquifères calcaires de la Nièvre, qui couvrent 4 200 km².
Les ressources en eau de ces calcaires constituent une richesse pour le fonctionnement des rivières, pour l’alimentation en eau potable, pour l’irrigation, et plus largement pour les activités humaines. Or le comportement de ces nappes souterraines, comme celui des cours d’eau et des milieux humides, évolue. L’ampleur et la fréquence des tensions quantitatives augmentent avec l’évolution du climat.
Un des objectifs de l’analyse HMUC, planifiée pour être rendue à la fin de 2024, sera la mise en relief de la problématique.
Elle pourra constituer un préalable à un Projet de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE) qui sera élaboré dans la perspective d’arriver à un équilibre entre besoins et ressources en eau, à une sobriété dans les usages, à préserver la qualité des eaux et la fonctionnalité des écosystèmes aquatiques, à anticiper le changement climatique et ses conséquences, et à s’y adapter.