Habilitées en mai dernier parmi les Territoires zéro chômeur de longue durée, les Portes du Morvan (ex-canton de Lormes) se mettent en ordre de bataille pour ramener vers l’emploi environ 70 personnes d’ici fin 2025. Un défi porté depuis plusieurs années par une force collective et bénévole dont l’ampleur a été saluée lors de la signature des conventions d’habilitation, le 30 septembre, en présence des premiers salariés de l’Entreprise à but d’emploi.
Ils entrevoient enfin « le bout du tunnel. » Depuis le 1er septembre, Vanessa, Pierre, Véronique, Maryse et six autres habitants de l’ex-canton de Lormes sont les premiers salariés de l’Entreprise à but d’emploi (EBE) des Portes du Morvan, le bras armé du Territoire zéro chômeur de longue durée habilité en mai dernier (voir encadré). « Cela fait depuis 2014 que je cherche à sortir du chômage », explique Maryse, 38 ans, ex-professeure des écoles. En 2019, elle a accroché son espoir et sa détermination à cette ambition alors « un peu gazeuse, un peu improbable », selon Christian Paul, maire de Lormes et président du Pays Nivernais Morvan.
Non loin d’elle, dans la salle de conseil de la mairie de Lormes, juste après la signature des conventions d’habilitation qui entérinent la place des Portes du Morvan parmi les aires d’expérimentation de Territoires Zéro chômeur, ce n’est pas uniquement l’émotion qui fait trembler Pierre, 54 ans : « Travailler, c’est une thérapie pour moi. J’ai eu un cancer en 2020, et cela fait deux ans que je réapprends tout. Il me fallait une activité pour me rétablir de cette maladie, et aussi pour vivre correctement. J’ai la chance d’avoir une deuxième vie, je ne veux pas la laisser passer. »
Entre les premiers salariés de l’EBE, des liens déjà forts se sont tissés, au cours de ces années d’espoir et de construction du projet pour certains, dans ces semaines de pré-formation en partie passées au CFPPA de Château-Chinon pour d’autres, avant les stages en entreprise en octobre. « On est tous un peu des cabossés de la vie, mais très motivés », sourit l’un des membres de l’équipe après la visite au pas de charge des futurs ateliers dans lesquels seront réalisées les activités de l’EBE – démontage d’huisseries, recyclerie, fabrication de produits ménagers naturels, livraisons et transport à la demande pour commencer.
A l’instar des autres Territoires zéro chômeur du Pays Nivernais Morvan (Luzy, Clamecy et les Vaux d’Yonne, Moulins-Engilbert), les Portes du Morvan ont devant eux l’aube enthousiasmante d’une histoire à construire, d’une réalité à échafauder après des années de projet. « Cette signature de conventions est un moment officiel mais aussi assez émouvant pour beaucoup d’entre nous », souligne Christian Paul. « J’ai une très grande admiration pour celles et ceux qui ont travaillé sur le projet depuis quatre ans, voire plus. Je n’ai jamais vu un projet qui mobilise autant. Il faut désormais le faire vivre. »
Même émotion pour Vincent Duchateau, président de l’EBE, impressionné par « l’énergie collective » déployée depuis trois ans, et pour Fabien Bazin, président du Comité local pour l’emploi des Portes du Morvan, la structure porteuse du projet Territoire zéro chômeur : « Plus qu’un projet de territoire, c’est un projet de vie, c’est la conjonction d’histoires particulières où on retrouve toute la société du Morvan. Nous sommes dans une vraie révolution copernicienne : on change notre rapport à l’emploi, on le réinvente. »
Rappelant que l’expérimentation Territoires zéro chômeur de longue durée (menée à Prémery depuis 2017) était née d’une proposition d’ATD Quart Monde pour briser la spirale de l’éloignement de l’emploi et de tous ses repères, le préfet Daniel Barnier a salué « une étape très importante pour les Portes du Morvan », où plus de 154 chômeurs de longue durée ont été recensés par les services de Pôle emploi, les travailleurs sociaux et les communes : « Le taux de chômage est de 6,4 % dans la Nièvre, inférieur donc au taux national, mais il reste encore sur le côté beaucoup de personnes éloignées durablement de l’emploi, souvent touchées par des accidents de la vie. »
C’est à elles que s’adresse en priorité le Territoire zéro chômeur de longue durée, en s’adaptant aux compétences, aux aspirations et à la capacité de travail de chacun, pour un retour en douceur dans le giron social.