« Être en toutes lettres », est le nom donné par le Conseil départemental de la Nièvre qui a initié cette journée départementale de lutte contre l’illettrisme, mardi 13 septembre au Prieuré de La Charité-sur-Loire. Première étape primordiale d’un large dispositif qui se met en place dans le département, c’est une assemblée de près de 140 personnes, composée de nombreux partenaires, acteurs publics, associatifs locaux et professionnels de l’insertion et de l’accompagnement social, qui étaient au rendez-vous.
Engagé de longue date dans la lutte contre l’illettrisme, le Département de la Nièvre s’est fixé comme objectifs d’améliorer l’accompagnement apporté aux personnes ayant des difficultés avec la lecture, l’écriture et le calcul, et de garantir une véritable égalité d’accès à ce service public, partout sur le territoire. Comme l’exprimait Fabien Bazin, président du Conseil départemental de la Nièvre, à l’introduction de cette journée : « Le but de cette démarche est de donner la parole aux personnes en situation d’illettrisme et aux militants de terrain. Ce n’est qu’un moment de la stratégie de lutte que l’on doit définir ensemble pour agir contre ce fléau, et même si c’est un mot peu employé en politique c’est probablement une belle histoire d’amour que l’on doit écrire tous ensemble ! ”
Inédite, cette journée a débuté par deux conférences sur la thématique « du repérage à l’orientation et à l’accompagnement des personnes en situation d’illettrisme ». Christian Lucas, fondateur de la Maison des enfants au pays, a d’abord présenté « l’art de la rencontre », un art subtil entre l’apprenant et l’apprenti qui n’est pas toujours aisé, et qui doit se baser sur la gratuité, la parité et la réciprocité mais aussi sur l’humilité.
Puis Aurélie Audemar a expliqué qu’en Belgique, à travers le collectif Alpha de Bruxelles auquel elle appartient, « la lutte contre l’illettrisme, ou plutôt d’alphabétisation populaire », n’est pas tout à fait la même que celle exercée en France. En effet, la Belgique se base davantage sur la définition de l’UNESCO, qui place l’alphabétisation par rapport à l’exigence de critères sociétaux alors que la France se base plutôt surtout sur les causes et l’expérience de « l’apprenti ».
Ces deux interventions ont suscité l’envie d’échanger entre les partenaires associatifs locaux. Mais c’est surtout la parole d’Oscar qui a retenu l’attention de la salle. Il n’a pas hésité à rentrer dans le vif du sujet et a témoigné de son expérience. Après le décès de sa femme cadre médical, il s’est vite retrouvé en difficulté pour effectuer ses démarches. Il a cherché de l’aide, mais la seule qu’il avait trouvée sur le moment était une formation payante de la Chambre des métiers ; il ne pouvait prétendre à une formation gratuite. Ce précieux témoignage, et les échanges de l’ensemble de l’assemblée, ont permis d’ouvrir le débat et de s’interroger pour améliorer la lutte contre l’illettrisme dans la Nièvre et notamment pour repérer ces invisibles qui ne sont pas forcément ceux que l’on croit. Car en effet, de nombreuses personnes en situation d’illettrisme sont actives, et sont allées à l’école ; beaucoup trouvent des stratégies d’évitement ou d’adaptation mais n’osent pas franchir le cap de l’acceptation pour rentrer en formation et ne savent pas trop comment se faire accompagner.
L’après-midi, ce sont 8 ateliers qui ont permis de poursuivre et de clôturer la rencontre des professionnels. Échanges de pratiques, sensibilisation à l’illettrisme, décloisonnement des approches, regards croisés sur les expériences entre apprenants et apprentis, ont permis à chacun de perfectionner ses connaissances des actions déjà engagées et d’en tirer un bilan mutualisé.
Si « Être en toutes lettres » n’est que le début d’une grande histoire à écrire collectivement et que le sujet est d’envergure, la motivation et l’engagement des partenaires ne font aucun doute. Tous s’accordent à dire que l’enjeu est primordial, confirmé par l’intervention de Fabien Bazin : « Il est essentiel de réfléchir ensemble à de nouveaux projets au bénéfice des Nivernais et des Nivernaises les plus fragiles, ne serait-ce que par souci d’égalité. »
Cette première journée augure de belles actions collaboratives que nous ne manquerons pas de vous partager.